Statut fiscal du bailleur privé : une réforme attendue… mais menacée ?

Statut fiscal du bailleur privé : une réforme attendue… mais menacée ?

En pleine crise du logement, la question de la fiscalité des bailleurs privés s’impose comme un enjeu majeur pour l’avenir du marché immobilier français. Depuis plusieurs années, professionnels, fédérations de propriétaires et experts du secteur réclament une réforme en profondeur : un cadre clair, stable et incitatif qui redonne confiance aux investisseurs. Le rapport parlementaire Daubresse–Cosson, remis en juin 2025, devait enfin concrétiser cette ambition en posant les bases d’un statut fiscal du bailleur privé.

Ce projet, présenté comme une véritable révolution, visait à simplifier et harmoniser la fiscalité locative, tout en créant des incitations fortes pour soutenir l’investissement dans le neuf et surtout dans l’ancien rénové. À travers des dispositifs d’amortissement, des bonus fiscaux pour les loyers abordables et un renforcement du micro-foncier, il entendait réconcilier l’État, les bailleurs et les locataires dans un contexte où la rareté des biens et la flambée des loyers alimentent la tension sociale.

Prévu pour entrer en vigueur au 1ᵉʳ janvier 2026, ce statut devait apporter une nouvelle visibilité aux propriétaires bailleurs. Il leur offrirait des perspectives fiscales comparables à celles dont bénéficient déjà les investisseurs en meublé (LMNP), tout en encourageant les rénovations énergétiques et la mise sur le marché de logements accessibles. Autrement dit, une réforme structurante, pensée comme une arme anti-crise pour relancer l’offre locative.

👉 Mais la réalité politique française est tout autre. Entre changements de gouvernement, arbitrages budgétaires contraints et instabilité institutionnelle, l’avenir de ce dispositif reste aujourd’hui incertain. Cette réforme tant attendue par les professionnels du logement est donc suspendue à une question cruciale : la volonté politique sera-t-elle suffisamment forte pour franchir le pas et offrir enfin aux bailleurs privés un statut fiscal digne de ce nom ?


Sommaire

  1. Le projet : refonder la fiscalité locative

  2. Des ambitions fortes freinées par la réalité politique

  3. Conséquences possibles pour les bailleurs et investisseurs

  4. Une réforme qui redessine la concurrence entre “nu” et “meublé”

  5. Enjeux macro : au-delà de la fiscalité

  6. Conclusion & appel à l’action


1. Le projet : refonder la fiscalité locative

La fiscalité locative en France est souvent décrite comme l’un des freins majeurs à l’investissement immobilier. Complexe, instable et régulièrement modifiée par les gouvernements successifs, elle décourage de nombreux propriétaires. Le rapport Daubresse–Cosson, remis en juin 2025, ambitionne de corriger cette situation en créant un statut fiscal du bailleur privé.

Ce projet est présenté comme une réforme structurante : il ne s’agit pas d’un énième dispositif temporaire, mais d’une refonte globale visant à donner aux bailleurs une vision claire, durable et incitative.


1.1. Pourquoi une réforme était nécessaire

Pendant des années, les bailleurs privés ont dû composer avec :

  • une fiscalité éparpillée, entre micro-foncier, réel, micro-BIC, régimes spéciaux pour le meublé, dispositifs Pinel, Denormandie, Censi-Bouvard, etc. ;

  • une instabilité chronique, chaque loi de finances introduisant de nouvelles règles, réduisant ou supprimant certains avantages ;

  • une lisibilité quasi inexistante : difficile pour un propriétaire de prévoir son rendement net sur plusieurs années, et encore plus de simuler une stratégie de long terme.

Conséquence : la location nue, historiquement majoritaire, a perdu en attractivité face au LMNP (Loueur en Meublé Non Professionnel), qui offre une fiscalité plus simple et plus favorable. Beaucoup d’investisseurs se sont détournés de la location classique, aggravant la pénurie de logements disponibles à la location.

👉 Le constat est clair : sans réforme, le marché locatif privé ne peut pas se redresser durablement.


1.2. Les objectifs du statut fiscal du bailleur privé

Le projet vise à :

  1. Simplifier la fiscalité : réduire le nombre de régimes, harmoniser les règles, donner de la clarté aux bailleurs.

  2. Encourager la rénovation énergétique : en conditionnant certains avantages à la réalisation de travaux.

  3. Rendre la location nue plus attractive : afin de rééquilibrer la concurrence avec le LMNP.

  4. Soutenir l’offre locative abordable : via des bonus fiscaux pour les loyers modérés.

  5. Donner de la visibilité : un cadre pérenne qui ne change pas tous les deux ans, pour restaurer la confiance des investisseurs privés.


1.3. Les mesures phares du dispositif

a) Amortissement du bien

  • 5 %/an pour le neuf (hors valeur foncière), pendant 20 ans.

  • 4 %/an pour l’ancien, à condition d’effectuer des travaux représentant au moins 15 % de la valeur du logement.

👉 C’est une avancée majeure : jusqu’ici, seul le meublé permettait un amortissement, ce qui créait une inégalité entre nu et meublé.

b) Bonus d’amortissement pour loyers abordables

Pour inciter les bailleurs à pratiquer des loyers inférieurs au marché, un bonus est prévu :

  • +0,5 % à +1,5 % d’amortissement supplémentaire.

C’est une mesure incitative double : le bailleur optimise sa fiscalité tout en contribuant à l’accès au logement pour les classes moyennes et modestes.

c) Micro-foncier renforcé

Le régime du micro-foncier est souvent critiqué car trop limité. La réforme prévoit :

  • un plafond porté à 30 000 € de revenus locatifs (au lieu de 15 000 €),

  • un abattement de 50 % (au lieu de 30 %).

👉 Cela permet à de nombreux petits bailleurs d’avoir une gestion simplifiée, avec un régime attractif et sans lourde comptabilité.

d) Maintien d’un avantage pour le meublé (LMNP)

Le statut du bailleur privé ne cherche pas à supprimer l’avantage du LMNP, mais à le rééquilibrer :

  • abattement forfaitaire de 50 %, plafonné à 77 700 € de loyers.

Ainsi, le meublé conserve un intérêt fiscal, mais n’écrase plus totalement la location nue.

e) Sortie de l’assiette IFI (Impôt sur la Fortune Immobilière)

Les logements loués en résidence principale pourraient sortir de l’assiette de l’IFI. Cela représente un signal fort pour les investisseurs patrimoniaux, souvent freinés par la fiscalité sur le capital immobilier.


1.4. Un statut pensé comme une “arme anti-crise”

La philosophie de cette réforme est claire :

  • redonner confiance aux bailleurs,

  • mobiliser du capital privé pour financer l’offre locative,

  • relancer les travaux pour soutenir la filière du bâtiment,

  • stabiliser les loyers en créant des incitations à la modération.

En d’autres termes, le statut fiscal du bailleur privé n’est pas seulement une réforme technique. C’est un outil de politique publique destiné à répondre à la crise du logement. Il traduit l’idée que les bailleurs privés ne sont pas des adversaires, mais des alliés indispensables pour loger les Français.


2. Des ambitions fortes… freinées par la réalité politique

Le statut fiscal du bailleur privé était présenté comme une réforme majeure, capable de transformer en profondeur le marché locatif français. Portée par le rapport parlementaire Daubresse–Cosson, elle avait tout pour séduire : simplicité, incitations fiscales, équité entre location nue et meublée. Pourtant, son avenir reste aujourd’hui très incertain. La raison ? Une réalité politique française instable, où chaque projet ambitieux se heurte à des contraintes budgétaires et institutionnelles.


2.1. Un accueil favorable au départ

Lors de sa présentation en juin 2025, le rapport a été largement salué par la profession :

  • Les fédérations de bailleurs y ont vu un signal fort, après des années de fiscalité perçue comme punitive.

  • Les professionnels de l’immobilier (agents, notaires, promoteurs) ont apprécié une réforme qui redonnerait de la visibilité au marché.

  • Les investisseurs particuliers ont accueilli positivement la perspective d’un cadre plus clair, moins fragmenté et plus incitatif.

Beaucoup voyaient dans ce statut une révolution comparable à l’invention du LMNP : une refonte durable, pensée pour résister aux alternances politiques et donner confiance aux investisseurs privés.


2.2. Les premiers obstacles : un contexte politique instable

Mais très vite, la réforme s’est retrouvée fragilisée par le contexte politique.

  • Changements de gouvernement : la recomposition politique de 2025, marquée par de nouvelles alliances, a déplacé les priorités législatives. Le logement, pourtant urgent, s’est retrouvé relégué derrière d’autres dossiers (sécurité, énergie, dette publique).

  • Majorité fragile : sans majorité parlementaire stable, difficile de faire passer un projet coûteux. Chaque mesure devient un terrain de négociation entre groupes politiques.

  • Oppositions idéologiques : certains partis considèrent la réforme trop favorable aux propriétaires et pas assez centrée sur les locataires, ce qui alimente les tensions.

En clair : même un projet jugé pertinent techniquement peut être paralysé par la réalité parlementaire française.


2.3. La question du coût budgétaire

L’un des principaux freins est financier. La réforme prévoit :

  • des amortissements massifs (5 %/an pour le neuf, 4 %/an pour l’ancien),

  • un micro-foncier renforcé (plafond doublé, abattement de 50 %),

  • des bonus fiscaux pour loyers modérés,

  • une possible exonération partielle d’IFI.

👉 Ces mesures représentent un coût budgétaire élevé pour l’État.

  • Le ministère des Finances estime que la réforme pourrait coûter plusieurs milliards d’euros par an en manque à gagner fiscal.

  • Dans un contexte où le déficit public dépasse les 5 % du PIB et où Bruxelles exige des efforts de rigueur, la marge de manœuvre budgétaire est faible.

Ainsi, même si le statut est techniquement solide, il se heurte à une contrainte économique : comment financer une telle réforme sans alourdir encore la dette publique ?


2.4. L’incertitude institutionnelle : un texte suspendu au vote du budget

En France, toute réforme fiscale doit être intégrée au projet de loi de finances. Le statut du bailleur privé devait figurer dans la loi de finances 2026. Mais :

  • Si le budget est rejeté, la réforme tombe avec lui.

  • Si le gouvernement choisit de revoir ses priorités, la mesure peut être repoussée ou vidée de sa substance.

Marc-Philippe Daubresse lui-même l’a reconnu en septembre 2025 :

« Nous avons réussi à inscrire le statut dans le budget, mais son adoption dépendra des équilibres politiques. »

Cette phrase illustre parfaitement la fragilité du projet : il est prêt techniquement, mais son sort dépend d’un jeu d’alliances parlementaires incertain.


2.5. Une réforme victime des “priorités divergentes”

La crise du logement est réelle, mais le gouvernement doit arbitrer entre :

  • financer la transition énergétique (MaPrimeRénov’, rénovation des passoires thermiques),

  • soutenir la compétitivité économique,

  • réduire le déficit public pour respecter les engagements européens,

  • répondre aux urgences sociales (santé, retraites, sécurité).

Dans cette hiérarchie, le statut fiscal du bailleur privé risque de passer au second plan. Pourtant, il pourrait être un levier puissant pour réactiver l’investissement locatif et répondre à la demande croissante de logements.


2.6. Bilan : une réforme techniquement solide mais politiquement fragile

En résumé :

  • Le projet est prêt et approuvé par les experts,

  • mais il est fragilisé par le coût budgétaire,

  • bloqué par l’instabilité politique,

  • et menacé par des priorités divergentes.

Ce décalage entre la nécessité économique et la réalité politique est typiquement français : beaucoup de réformes ambitieuses se retrouvent suspendues au climat institutionnel, parfois reportées ou vidées de leur substance.

👉 Pour les investisseurs et bailleurs privés, l’incertitude reste donc totale : faut-il anticiper ce statut et préparer sa stratégie, ou au contraire attendre des signaux plus clairs avant d’agir ?


3. Conséquences possibles pour les bailleurs et investisseurs

La réforme du statut fiscal du bailleur privé n’est pas un simple ajustement technique : elle redessinerait en profondeur les stratégies patrimoniales des investisseurs. Selon son adoption — ou son abandon —, les conséquences pour les bailleurs privés pourraient être diamétralement opposées.

En 2025, le climat est marqué par l’incertitude : doit-on anticiper ce nouveau statut ou continuer avec les régimes existants (nu, LMNP, micro-foncier, réel) ? Pour les propriétaires, il est essentiel d’envisager les deux scénarios : celui de l’adoption et celui de l’échec.


3.1. Opportunités si le statut est adopté

a) Une meilleure lisibilité fiscale

La grande force du projet est la clarification. Aujourd’hui, beaucoup d’investisseurs se perdent dans la complexité des régimes (micro-foncier, réel, LMNP, micro-BIC, etc.). Le nouveau statut offrirait :

  • un amortissement clair et prévisible (4 % à 5 % par an),

  • un cadre unique au lieu d’une multitude de niches et de dispositifs temporaires,

  • la possibilité de simuler facilement son rendement net, sur 10, 15 ou 20 ans.

👉 Pour les bailleurs, c’est la fin de l’incertitude fiscale, ce qui encourage l’investissement long terme.

b) Relance de l’investissement locatif, surtout dans l’ancien

Avec un amortissement de 4 %/an conditionné à 15 % de travaux, le statut inciterait fortement à investir dans l’ancien à rénover. Cela aurait deux effets positifs :

  • Valoriser le parc existant en incitant aux rénovations (particulièrement énergétiques),

  • Relancer les mises en location de logements aujourd’hui vacants ou dégradés.

Pour les investisseurs, cela signifie de nouvelles opportunités d’achat avec plus-value potentielle à la revente.

c) Un marché plus attractif face aux autres placements

Dans un contexte où l’épargne bancaire est peu rémunératrice et où la bourse reste volatile, l’immobilier conserve son rôle de valeur refuge. Un statut fiscal clair et avantageux renforcerait cette attractivité :

  • Rendement sécurisé,

  • Prévisibilité fiscale,

  • Actif tangible et transmissible.


3.2. Risques si le projet échoue

a) Maintien d’une fiscalité fragmentée

Sans réforme, la situation reste inchangée :

  • Location nue : fiscalité lourde, abattement limité (30 % au micro-foncier).

  • Location meublée : régime plus favorable mais exigeant (gestion, comptabilité).

  • Multiplication de niches temporaires, jamais garanties sur le long terme.

Cette instabilité chronique continuerait de décourager de nombreux bailleurs.

b) Découragement des investisseurs privés

Face à l’absence de vision fiscale, certains propriétaires pourraient :

  • limiter leurs projets,

  • vendre leurs biens plutôt que de les louer,

  • ou basculer leurs capitaux vers d’autres placements (assurance-vie, SCPI, bourse).

👉 Dans un marché déjà tendu, cela risquerait d’aggraver la pénurie de logements à louer.

c) Basculement vers le meublé (LMNP)

Si le statut n’est pas adopté, le LMNP resterait le grand gagnant :

  • abattement forfaitaire de 50 %,

  • possibilité d’amortir au réel,

  • régime fiscal stable depuis plusieurs années.

Les investisseurs continueraient donc à privilégier le meublé plutôt que la location nue, accentuant le déséquilibre du marché locatif.


3.3. Stratégies d’anticipation pour les bailleurs

Dans ce contexte incertain, les bailleurs doivent adopter une stratégie flexible :

  • Scénario 1 : la réforme passe

    • Anticiper des acquisitions dans l’ancien avec travaux pour profiter de l’amortissement.

    • Préparer des simulations comparatives entre nu amortissable et LMNP.

    • Se rapprocher de conseillers en gestion de patrimoine pour évaluer les impacts fiscaux.

  • Scénario 2 : la réforme échoue

    • Continuer d’optimiser via le LMNP, qui reste un cadre fiscal performant.

    • Utiliser le régime réel pour amortir son bien meublé.

    • Arbitrer son patrimoine (revendre certains biens, réinvestir ailleurs).

👉 Quelle que soit l’issue, l’essentiel est de préparer ses choix à l’avance plutôt que d’attendre passivement.


3.4. Exemple pratique : un investisseur type

Prenons l’exemple de Sophie, investisseuse à Lyon.

  • Elle détient un appartement de 55 m² en location nue, acheté en 2018 pour 220 000 €.

  • Aujourd’hui, ses loyers nets sont fortement fiscalisés, et elle envisage de revendre.

👉 Avec le statut fiscal du bailleur privé :

  • Elle pourrait amortir 4 %/an sur la valeur du bien (hors foncier),

  • Gagner un bonus d’amortissement en fixant un loyer 15 % sous le prix du marché,

  • Et donc conserver son bien tout en allégeant fortement son impôt.

👉 Sans la réforme :

  • Sa fiscalité resterait lourde,

  • Elle envisagerait de passer en meublé LMNP pour bénéficier de l’amortissement,

  • Ou de revendre pour se tourner vers un autre investissement.

Cet exemple illustre bien que l’avenir de la réforme déterminera les choix stratégiques de milliers de bailleurs privés.


3.5. Impact sur le marché global

  • Si la réforme est adoptée : augmentation des rénovations, stabilisation des loyers, retour de capitaux vers le locatif nu.

  • Si elle échoue : poursuite du déséquilibre, développement massif du meublé, raréfaction de l’offre en location nue.


4. Une réforme qui redessine la concurrence entre “nu” et “meublé”

Depuis plus de dix ans, l’investissement immobilier locatif est marqué par une inégalité fiscale structurelle : la location meublée (via le statut LMNP – Loueur en Meublé Non Professionnel) est bien plus avantageuse que la location nue. Cela a conduit de nombreux investisseurs à délaisser le logement vide, pourtant majoritaire dans le parc français, au profit du meublé, plus rentable et fiscalement attractif.

Le projet de statut fiscal du bailleur privé pourrait changer la donne en rééquilibrant la concurrence entre ces deux modes d’investissement.


4.1. Location nue vs LMNP : un duel fiscal depuis des années

La location nue : un régime souvent jugé pénalisant

Aujourd’hui, le bailleur qui loue un logement vide doit choisir entre :

  • le micro-foncier, qui permet un abattement de 30 % sur les revenus locatifs, plafonné à 15 000 € ;

  • le régime réel, qui permet de déduire certaines charges (travaux, intérêts d’emprunt, frais de gestion), mais sans possibilité d’amortir le bien.

👉 Résultat : la fiscalité est souvent lourde, surtout si le bien est déjà payé (plus d’intérêts à déduire) ou si les charges ne couvrent pas suffisamment les loyers.

Le LMNP : un statut plébiscité

Le statut LMNP, à l’inverse, offre des avantages considérables :

  • micro-BIC : abattement forfaitaire de 50 % (plafond 77 700 € de loyers),

  • régime réel : amortissement du bien (hors foncier) et du mobilier, permettant souvent d’effacer la quasi-totalité de l’impôt pendant 10 à 20 ans,

  • gestion souple, compatible avec des résidences gérées (étudiantes, seniors, affaires).

👉 Le LMNP est donc perçu comme plus rentable et fiscalement intelligent, d’où son succès auprès des investisseurs.


4.2. Comment le statut du bailleur privé change les règles du jeu

Le rapport Daubresse–Cosson introduit plusieurs mesures qui rapprochent la location nue des avantages du meublé :

  • Amortissement du bien :

    • 5 %/an pour le neuf (hors valeur foncière),

    • 4 %/an pour l’ancien avec travaux (≥ 15 % de la valeur du bien).
      👉 Pour la première fois, la location nue devient “amortissable”, comme le meublé.

  • Bonus d’amortissement pour loyers modérés :
    +0,5 % à +1,5 % supplémentaires pour les bailleurs pratiquant des loyers inférieurs au marché.
    👉 Le dispositif introduit une incitation sociale : l’investisseur est récompensé s’il contribue à l’accessibilité au logement.

  • Micro-foncier renforcé : plafond porté à 30 000 € de loyers avec un abattement de 50 %.
    👉 Le régime micro-foncier devient presque aussi attractif que le micro-BIC du meublé.

Ces mesures permettent de réduire l’écart fiscal entre nu et meublé, sans supprimer les avantages du LMNP.


4.3. Un impact concret sur les choix des investisseurs

Avec ce nouveau statut, les investisseurs se retrouveraient face à un choix stratégique équilibré :

  • Investir en nu avec amortissement :

    • plus grande sécurité juridique,

    • bail classique (3 ans renouvelable),

    • incitations fiscales via l’amortissement et les bonus loyers modérés.

  • Investir en LMNP :

    • plus grande souplesse fiscale (micro-BIC ou réel),

    • amortissements plus complets (mobilier inclus),

    • mais souvent associé à une gestion plus exigeante (mobilier, turn-over).

👉 Pour la première fois, la location nue deviendrait compétitive, voire préférable dans certains cas (ancien rénové, loyers modérés, biens familiaux).


4.4. Les conséquences possibles pour le marché locatif

Si la réforme est adoptée

  • Retour en force de la location nue, qui pourrait redevenir attractive.

  • Plus de logements loués vides, répondant à la forte demande des familles.

  • Moins de pression sur le LMNP, qui ne serait plus le seul choix fiscalement intéressant.

Si la réforme échoue

  • Le déséquilibre se maintient : le meublé garde sa domination fiscale.

  • Les bailleurs continueront à privilégier le LMNP, parfois même au détriment du marché familial.

  • Les logements nuds resteront moins compétitifs fiscalement, ce qui aggravera la pénurie.


4.5. Exemple comparatif

Prenons l’exemple de Paul, investisseur à Nantes.

  • Son bien génère 15 000 € de loyers annuels.

  • En location nue (régime micro-foncier actuel), il bénéficie d’un abattement de 30 %, donc 10 500 € imposables.

  • En LMNP (micro-BIC), il bénéficie d’un abattement de 50 %, donc 7 500 € imposables.

👉 Aujourd’hui, le LMNP est nettement plus avantageux.

Mais avec le statut fiscal du bailleur privé :

  • Paul bénéficierait d’un abattement de 50 % en micro-foncier renforcé (soit 7 500 € imposables),

  • ou d’un amortissement de 4 %/an s’il choisit le régime réel.

Résultat : la location nue redeviendrait compétitive, et Paul pourrait choisir entre nu et meublé en fonction de son projet patrimonial (plutôt que seulement sur un critère fiscal).


4.6. Un rééquilibrage attendu par la profession

De nombreux experts, notaires et conseillers en gestion de patrimoine soulignent que ce rééquilibrage est nécessaire. Aujourd’hui, le déséquilibre en faveur du LMNP a détourné une partie des capitaux de la location nue, ce qui réduit l’offre pour les familles et alimente la crise du logement.

👉 En rendant la location nue fiscalement plus intéressante, le statut du bailleur privé permettrait de :

  • fluidifier le marché,

  • réduire la tension locative,

  • diversifier les choix d’investissement.


5. Enjeux macro : au-delà de la fiscalité

Si le débat autour du statut fiscal du bailleur privé semble technique, ses implications dépassent largement la fiscalité. Ce projet touche à des questions de société : comment loger les ménages dans un contexte de crise, comment rénover le parc immobilier français, et comment mobiliser les investisseurs privés pour pallier les limites du logement social.


5.1. Une crise du logement historique

La France traverse une crise du logement inédite depuis 40 ans :

  • Chute des mises en chantier : en 2024, moins de 290 000 logements neufs ont été commencés, contre plus de 400 000 en 2017 (source : Ministère de la Transition écologique).

  • Baisse de l’offre locative : selon l’Observatoire Clameur, le nombre de biens disponibles à la location privée a chuté de plus de 15 % entre 2018 et 2024.

  • Loyers en hausse : dans les grandes métropoles, les loyers progressent plus vite que l’inflation (Paris : +3,5 % en 2024, Lyon : +4,2 %).

  • Tension record : le ratio candidats / logements explose : à Paris, un studio étudiant peut recevoir jusqu’à 832 demandes à la rentrée 2025 (source : Lodgis).

👉 Dans ce contexte, la réforme n’est pas un “cadeau fiscal”, mais une tentative de réponse structurelle à la crise.


5.2. Le rôle central des bailleurs privés

Les bailleurs privés détiennent environ 95 % du parc locatif privé en France (source : Insee). Ils logent plus de 7 millions de ménages, souvent dans des zones où l’offre publique (logement social) est insuffisante.

Sans eux, le marché locatif ne pourrait pas absorber la demande :

  • Dans les grandes métropoles, ils complètent le parc social saturé.

  • Dans les villes moyennes, ils fournissent la majorité des logements étudiants et familiaux.

  • Dans les zones rurales, ils permettent le maintien d’une offre locative là où les bailleurs institutionnels se désengagent.

👉 Autrement dit, sans cadre attractif pour les bailleurs privés, le marché locatif s’asphyxie.


5.3. La rénovation énergétique : un levier incontournable

La réforme intègre une condition majeure : engager 15 % de travaux dans l’ancien pour bénéficier de l’amortissement. C’est une façon d’articuler fiscalité et transition écologique.

Pourquoi ? Parce que le parc français compte encore :

  • près de 5,2 millions de passoires thermiques (logements classés F ou G au DPE – source : Ministère du Logement),

  • et que la loi Climat & Résilience interdit progressivement leur location (interdiction totale en 2028).

👉 La fiscalité devient donc un levier de transformation écologique. Les bailleurs sont incités à rénov(er pour amortir fiscalement), ce qui améliore :

  • la valeur patrimoniale du bien,

  • la consommation énergétique,

  • le confort des locataires.


5.4. Un enjeu d’équité sociale

La crise du logement alimente les inégalités :

  • Les ménages modestes consacrent plus de 40 % de leurs revenus au logement dans certaines villes (source : Insee).

  • Le manque de logements abordables pousse de nombreux actifs à s’éloigner de leur lieu de travail, aggravant les problèmes de mobilité et de transport.

  • La concurrence entre meublé et nu désavantage souvent les familles, qui cherchent des baux longs et stables.

Le bonus d’amortissement prévu pour les loyers modérés est donc une réponse sociale : il récompense les bailleurs qui contribuent à maintenir une offre accessible.


5.5. Conséquences macroéconomiques

Si la réforme est adoptée :

  • Relance du marché locatif : plus d’investissements dans l’ancien rénové.

  • Soutien à la filière du bâtiment : les travaux obligatoires génèrent des emplois locaux.

  • Stabilisation des loyers : une offre plus abondante réduit la pression sur les prix.

  • Augmentation de la confiance des investisseurs : les capitaux privés reviennent dans l’immobilier résidentiel.

Si la réforme échoue :

  • Poursuite de la pénurie : moins de logements mis en location.

  • Concentration sur le LMNP : les investisseurs privilégient le meublé, ce qui exclut une partie des ménages.

  • Aggravation des tensions sociales : loyers toujours plus élevés, mobilité résidentielle freinée, marché bloqué.


5.6. Un enjeu politique majeur

Enfin, ce projet a une portée politique forte :

  • Il teste la capacité de l’État à créer un cadre fiscal stable et incitatif dans un domaine hautement sensible.

  • Il cristallise l’éternel débat : faut-il aider les propriétaires pour relancer l’offre, ou renforcer les droits des locataires ?

  • Il incarne une philosophie de partenariat public/privé : reconnaître que sans les bailleurs privés, aucune solution à la crise du logement n’est possible.

👉 Le statut fiscal du bailleur privé n’est pas seulement une mesure fiscale. C’est un choix de société : considérer les bailleurs comme des acteurs à mobiliser, et non comme des adversaires à taxer.


6. Conclusion

Le statut fiscal du bailleur privé est une réforme ambitieuse, attendue et potentiellement décisive pour relancer l’investissement locatif. Mais son avenir reste fragile, suspendu aux aléas politiques et budgétaires.

Conclusion d’expert – Parole à Yoann MAXEL

« Le statut fiscal du bailleur privé est une réforme structurante, qui pourrait changer la donne pour de nombreux investisseurs. Mais sa fragilité politique est un vrai sujet. Du côté du LMNP, nous bénéficions encore d’une fiscalité claire et attractive, ce qui reste un avantage compétitif. Mon conseil : rester attentif aux arbitrages parlementaires de fin 2025, comparer lucidement nu vs meublé, et surtout penser long terme. L’immobilier géré et le LMNP continuent de répondre à une demande croissante, mais l’arrivée de ce statut pourrait redessiner le jeu. »

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