IFI élargi 2026: vers un retour déguisé de l’ISF ?
Ce que les investisseurs doivent anticiper
Le 31 octobre 2025, l’Assemblée nationale a adopté un amendement qui pourrait profondément remodeler la fiscalité du patrimoine en France : l’élargissement de l’assiette de l’IFI à de nouveaux actifs dits improductifs.
Si cette réforme entre en vigueur le 1er janvier 2026, elle marquera un tournant majeur dans la stratégie patrimoniale des contribuables les plus aisés.
Décryptage des points clés, des conséquences pour les investisseurs immobiliers et des arbitrages à envisager… avec prudence.
1. Qu’est-ce que l’« impôt sur la fortune improductive » ?
Un nouvel impôt dans la lignée de l’IFI… mais au périmètre beaucoup plus large
Adopté en première lecture à l’Assemblée nationale le 31 octobre 2025, le projet d’IFI élargi — surnommé « impôt sur la fortune improductive » — marque une évolution majeure de la fiscalité du patrimoine en France.
Il s’inscrit dans la continuité de l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI), instauré en 2018 pour remplacer l’ISF, mais propose un changement de logique profond : ne plus taxer uniquement l’immobilier, mais l’ensemble des actifs jugés non productifs pour l’économie.
Autrement dit, le gouvernement cherche à distinguer :
-
les actifs productifs, créant de la valeur (titres d’entreprises, immobilier locatif, investissements dans les PME, etc.) ;
-
et les actifs improductifs, considérés comme inertes (liquidités, biens de luxe, fonds euros, œuvres d’art…).
Cette distinction reflète une volonté politique claire : favoriser l’investissement actif plutôt que la détention patrimoniale passive.
Les grandes caractéristiques de l’IFI élargi
-
Taux d’imposition unique à 1 %
Contrairement à l’actuel IFI, basé sur un barème progressif de 0,5 % à 1,5 % selon les tranches de patrimoine (source : Service-Public.fr), le nouvel impôt appliquerait un taux fixe de 1 %.
Objectif : simplifier le calcul, mais au risque d’alourdir la charge fiscale pour les contribuables dont le patrimoine est proche du seuil. -
Seuil de déclenchement inchangé : 1,3 million d’euros
Le seuil d’entrée dans le champ de l’impôt resterait celui défini à l’article 964 du Code général des impôts.
Mais avec une assiette élargie à de nouveaux types d’actifs, de nombreux foyers jusqu’ici non imposés pourraient être concernés. -
Assiette étendue aux actifs “improductifs”
Le texte prévoit d’intégrer :-
les liquidités excédentaires (hors livrets réglementés) ;
-
les fonds en euros des contrats d’assurance-vie ([voir les précisions de la Direction Générale du Trésor]) ;
-
les cryptomonnaies ([encadrées fiscalement depuis 2019 selon la loi PACTE]),
-
les œuvres d’art, bijoux, voitures de collection, yachts, jets privés ;
-
et plus largement les biens matériels de luxe non liés à une activité professionnelle.
-
– Résultat : l’IFI élargi deviendrait un impôt sur la détention patrimoniale, et non plus seulement sur la richesse immobilière.
Une logique économique revendiquée
Selon la commission des finances de l’Assemblée nationale, cette réforme vise à mobiliser l’épargne dormantepour financer l’économie productive.
On estime à près de 650 milliards d’euros le volume de liquidités inactives détenues sur des comptes bancaires français (source : Banque de France).
L’idée du gouvernement est simple : inciter les ménages aisés à réinvestir dans l’économie réelle — PME, immobilier locatif, infrastructures durables — plutôt que de conserver des avoirs sans rendement.
Mais ce choix interroge :
-
Peut-on réellement stimuler la croissance via une contrainte fiscale ?
-
Ou risque-t-on de pénaliser la prudence des épargnants, notamment des retraités et des investisseurs prudents ?
Des critiques déjà nombreuses
Les économistes et fiscalistes s’accordent à dire que cette réforme, dans sa forme actuelle, comporte des contradictions :
-
Les fonds en euros, composés à 80 % d’obligations d’État, financent déjà l’économie nationale. Leur taxation créerait une incohérence structurelle.
-
Les cryptomonnaies sont déjà soumises à une taxation sur les plus-values : leur inclusion dans l’assiette reviendrait à les taxer deux fois.
-
La réintégration des œuvres d’art, exonérées depuis 1982, fragiliserait le marché français de l’art, un secteur reconnu internationalement ([voir rapport du ministère de la Culture]).
Enfin, le taux fixe de 1 % interroge sur le plan social : un patrimoine composé d’une résidence principale n’a pas la même liquidité ni le même rendement qu’un portefeuille financier.
👉 Cela pose la question de l’équité réelle de la mesure.
En résumé
L’IFI élargi symbolise une réforme ambitieuse mais controversée :
-
elle récompense l’investissement productif,
-
tout en risquant de déstabiliser l’épargne de précaution.
La version définitive du texte, attendue d’ici fin 2025, précisera les contours de cette mesure avant son application prévue au 1er janvier 2026.
2. Un projet flou, des angles morts juridiques
A. Le texte adopté… mais ses contours restent imprécis
Le 31 octobre 2025, l’Assemblée nationale a validé en première lecture un amendement transformant l’actuel Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) en ce que l’on appelle désormais l’IFI élargi, ou « impôt sur la fortune improductive ». Le Monde.fr+1
Pourtant, même si la direction est claire, l’application concrète suscite plusieurs questions :
-
Le seuil d’assujettissement est mentionné mais varie selon les versions du texte (1,3 mio € vs 2 mio €) ; Assemblée Nationale+1
-
Le périmètre exact des « actifs improductifs » n’est pas fixé avec une logique uniforme (liquidités, assurances-vie, cryptos, biens mobiliers) ;
-
Le calendrier d’entrée en vigueur (1er janvier 2026) est évoqué mais dépend de la publication des décrets et des modalités d’application encore en discussion.
Ainsi, bien que le projet d’IFI élargi soit acté, le diable est dans les détails : mode de calcul, supports concernés, imbrication avec l’IFI actuel, et conséquences sur les structures patrimoniales restent mal clarifiés.
B. Points juridiques particulièrement litigieux
1. Traitement des contrats d’assurance-vie & fonds en euros
L’amendement adopté inclut les « sommes, rentes ou valeurs d’assurance-vie, exclusion faite de celles placées en unités de compte ». Assemblée Nationale+1
Mais plusieurs zones d’ombre persistent :
-
Quid des contrats de capitalisation ou des supports présents dans un Plan d’Épargne Retraite (PER) ?
-
Comment sera traitée la fraction investie en unités de compte, qui est censée être “productive” ?
-
Comment définir la “part improductive” d’un contrat mixte ?
Bref : un vaste champ de flou pour les détenteurs d’assurance-vie.
2. Actifs détenus via holding : l’arbitrage potentiel
Le texte modifiant l’article 965 du Code général des impôts parle d’actifs « improductifs », mais ne modifie pas directement certains articles relatifs aux holdings ou aux sociétés interposées. Meilleurtaux Placement+1
Cela crée une zone grise : les actifs improductifs logés dans une holding peuvent aujourd’hui échapper à l’imposition, ce qui pourrait conduire à des arbitrages stratégiques temporaires, voire à des ajustements rétroactifs.
3. Résidence principale et abattements : des règles à préciser
L’amendement mentionne la mise en place possible d’un abattement forfaitaire pour la résidence principale (ex. : 1 million €) sur la base du projet. Meilleurtaux Placement+1
Mais :
-
Qu’en est-il pour les résidences secondaires ?
-
Comment traiter les logements loués temporairement dans le cadre de l’économie hôtelière ou meublée ?
-
Le mécanisme actuel de plafonnement IFI (75 % des revenus) sera-t-il maintenu, modifié ou supprimé ? Certains articles évoquent son maintien. Meilleurtaux Placement
4. Plafonnement & traitement des dettes
Le mécanisme de plafonnement — qui empêche l’impôt total d’excéder un certain pourcentage des revenus — est pour l’instant indiqué comme “en attente de précision”.
De plus, la déductibilité des dettes (“passif”) rattachées aux biens imposables, et leur prise en compte dans la valeur nette taxable, restent à définir dans les règlements d’application.
C. Pourquoi ces zones d’incertitude importent pour l’investisseur ?
-
Timing risqué : Sans décrets clairs, toute réorganisation patrimoniale anticipée peut entraîner des erreurs de stratégie, voire des corrections fiscales.
-
Sécurité juridique faible : Un montage fabriqué sur la base d’interprétations incertaines peut être remis en cause ultérieurement.
-
Effet indirect sur l’immobilier : Même si l’immobilier locatif meublé reste “productif”, une réforme mal calibrée ou modifiée après coup peut bousculer la structuration patrimoniale des bailleurs.
-
Coûts de conformité : L’évaluation des nouveaux biens imposables (cryptos, œuvres d’art, voitures de collection) implique des frais d’expertise, de comptabilité, de conseil.
-En résumé
Le projet d’IFI élargi marque un virage fiscal — mais l’adoption d’un taux ou d’un seuil ne suffit pas, il faudrait des textes précis pour que la réforme soit opérable et équitable.
Pour l’instant : une vigilance élevée s’impose plutôt qu’une action immédiate. Il convient de suivre de près les décrets à venir, de calibrer les structures patrimoniales et de privilégier l’anticipation plutôt que la réaction.
3. Qui est concerné ?
3.1 Profils directement exposés (si l’IFI élargi entrait en vigueur tel quel)
-
Patrimoines nets supérieurs ou égaux à 1,3 million d’euros avec une part importante d’actifs dits « improductifs » : liquidités non investies, fonds en euros (sous conditions), cryptoactifs, œuvres d’art, biens de luxe, meubles corporels non liés à une activité professionnelle.
-
Grands épargnants privilégiant la sécurité : forte allocation en assurance-vie fonds euros ou dépôts bancaires, par choix de prudence ou par attente d’opportunités.
-
Collectionneurs et amateurs d’art ou de biens somptuaires : jusqu’ici largement en dehors du radar fiscal patrimonial, désormais potentiellement inclus.
-
Propriétaires de biens immobiliers fortement valorisés (Paris, Lyon, Bordeaux, zones côtières ou alpines) : les effets de seuil peuvent jouer même avec peu de liquidités si la base taxable s’élargit.
3.2 Cas “borderline” à surveiller de près
-
Mono-patrimoine immobilier avec épargne de précaution : une résidence principale ou secondaire très valorisée, ajoutée à un coussin de liquidités, peut suffire à franchir le seuil net.
-
Contrats d’assurance-vie hybrides : mélange de fonds euros et d’unités de compte ; la définition précise de la part improductive sera déterminante.
-
Investisseurs en cryptomonnaies long terme : conservation sur portefeuilles privés avec faible rotation ; l’assiette de l’IFI élargi pourrait retenir la valeur au 1er janvier sans tenir compte de la performance.
-
Détenteurs de biens de luxe (voitures de collection, bateaux, jets, bijoux) avec faible endettement : l’absence de passif déductible accroît la base nette taxable.
3.3 Profils plutôt épargnés (à ce stade du projet)
-
Investisseurs orientés vers des actifs productifs : titres d’entreprises, private equity, participations non cotées, immobilier locatif effectivement exploité (dont LMNP et résidences gérées).
-
Patrimoines diversifiés avec gouvernance patrimoniale claire : allocation stratégique, rotation, réinvestissement démontrant une finalité économique.
À noter : pour les parts de SCI à l’IR, le régime IFI actuel resterait la référence. Les holdings à l’IS constituent encore une zone grise réglementaire qui appelle à la prudence.
3.4 Personae rapides (approche pédagogique)
Persona A — Épargne de précaution XXL
1,6 million d’euros net, dont 600 000 € en liquidités, fonds euros et biens de luxe.
Exposé en l’état du projet, en raison d’une forte proportion d’actifs classables comme improductifs.
Persona B — Immobilier géré et LMNP
1,8 million d’euros net, dont 1,3 million en LMNP et résidences gérées effectivement louées, 300 000 € en unités de compte et 200 000 € en liquidités.
Faiblement exposé : cœur patrimonial productif, vigilance sur la poche liquidités.
Persona C — Collection et Crypto
1,4 million d’euros net, dont 400 000 € en art et voitures de collection, 250 000 € en cryptoactifs, 150 000 € en liquidités, le reste en titres non cotés.
Exposé sur la partie improductive (art et voitures) ; les cryptoactifs pourraient être inclus selon la version finale du texte.
3.5 Signaux d’alerte (checklist express)
-
Patrimoine net supérieur ou égal à 1,3 million d’euros
-
Plus de 25 à 30 % d’actifs potentiellement improductifs (liquidités, fonds euros sous conditions, biens de luxe, cryptomonnaies conservées long terme)
-
Faible endettement, donc peu de passifs déductibles
-
Contrats hybrides non clarifiés (vie, capitalisation, PER)
-
Aucune stratégie de réallocation vers des actifs productifs depuis plus d’un an
3.6 Données à réunir dès maintenant (sans modifier la structure existante)
-
Inventaire détaillé des actifs par catégorie (productifs vs potentiellement improductifs)
-
Valorisation actualisée sur le dernier trimestre 2025
-
Détail des contrats d’assurance-vie : supports, clauses, dates, options d’arbitrage
-
État du passif (dettes immobilières, privées, professionnelles) avec pièces justificatives
-
Preuves d’exploitation des actifs locatifs (baux, quittances, déclarations BIC pour LMNP)
Objectif : être en mesure de simuler l’exposition à l’IFI élargi sans précipitation, puis d’arbitrer avec discernement une fois les textes d’application publiés et stabilisés.
4. Impacts pour les investisseurs immobiliers et LMNP
4.1 Une relative stabilité pour l’immobilier productif
Le projet d’IFI élargi vise avant tout les patrimoines dits « improductifs ».
À ce titre, l’immobilier locatif — dès lors qu’il génère des revenus réguliers et qu’il participe à l’économie réelle — demeure en grande partie épargné.
Les biens relevant du statut LMNP (Loueur en Meublé Non Professionnel) ou intégrés à des résidences gérées sous bail commercial (résidences étudiantes, seniors, affaires, Ehpad, tourisme) restent considérés comme productifs.
Cette distinction s’appuie sur la définition de l’activité économique figurant dans le Code général des impôts – article 965, selon laquelle un bien immobilier est exclu de l’assiette IFI s’il contribue directement à l’exercice d’une activité industrielle, commerciale ou artisanale.
Ainsi :
-
un appartement LMNP loué en continu, déclaré en BIC réel ou micro-BIC, reste exclu de l’IFI élargi ;
-
une résidence gérée sous bail commercial actif est assimilée à un actif productif ;
-
les revenus générés témoignent d’une utilisation économique du patrimoine.
En revanche, un logement inoccupé, non loué ou à usage personnel pourrait être requalifié comme actif improductif et réintégré dans l’assiette du nouvel impôt.
4.2 Un risque indirect sur les structures intermédiaires
Les détenteurs de biens via des SCI à l’IR restent soumis au régime actuel : les parts sociales correspondant à des actifs immobiliers non professionnels demeurent imposables à l’IFI.
Pour les investisseurs ayant structuré leur patrimoine via une holding patrimoniale à l’IS, la situation est plus ambiguë.
Le projet d’IFI élargi ne précise pas le traitement des actifs détenus par des sociétés interposées.
Or, selon la jurisprudence du Conseil d’État, le critère d’activité réelle est déterminant : une société sans flux économiques tangibles pourrait être exclue du champ productif.
En pratique, cela signifie que :
-
une SCI passive détenant des biens loués à titre privé restera exposée ;
-
une holding animatrice ou mixte pourrait bénéficier d’une neutralité fiscale si elle démontre un rôle actif dans la gestion ;
-
une société d’exploitation immobilière (IS) avec revenus récurrents pourrait temporairement échapper à l’imposition.
Mais ces arbitrages ne sont pas définitifs : la Direction Générale du Trésor devra préciser les règles d’ici fin 2025.
4.3 LMNP : un statut à sécuriser, pas à surévaluer
Le statut LMNP, défini par le BOFIP-Impôts, conserve son intérêt fiscal et économique :
-
amortissement du bien,
-
régime BIC favorable,
-
revenus considérés comme professionnels,
-
et exclusion de l’IFI sous conditions.
Mais la réforme met en lumière un enjeu : la justification effective de l’exploitation locative.
Pour éviter toute requalification :
-
les revenus doivent être déclarés régulièrement,
-
le bail doit être en cours de validité,
-
et la location réelle et continue.
Le LMNP de revente — achat d’un bien déjà exploité sous bail commercial — reste une opportunité fiscale stable et un levier d’investissement immédiat.
Les résidences déjà gérées affichent des rendements nets sécurisés (souvent entre 4 % et 5 %) et évitent les risques de vacance ou de lancement d’exploitation.
4.4 Un effet signal à long terme : vers un durcissement global de la fiscalité patrimoniale
Même si les investisseurs immobiliers semblent aujourd’hui à l’abri, le message politique est clair :
la fiscalité du patrimoine en France se réoriente vers la valorisation des capitaux “actifs”.
Selon les travaux de la Cour des comptes, la concentration des patrimoines immobiliers et financiers a doublé en vingt ans.
L’IFI élargi traduit cette volonté de redistribuer l’effort fiscal vers les capitaux non réinjectés dans l’économie réelle.
Pour les investisseurs, cela suppose :
-
une veille fiscale permanente,
-
une stratégie d’arbitrage dynamique,
-
et une documentation rigoureuse des preuves d’exploitation.
4.5 Encadré – Analyse de Yoann Maxel (Y’Asset Management)
« L’immobilier géré, et particulièrement le marché secondaire du LMNP, reste aujourd’hui l’un des segments les plus cohérents :
il offre un rendement sécurisé, une fiscalité stable et une vraie productivité économique au sens de la réforme.Ce projet d’IFI élargi doit être vu comme un signal de vigilance, pas comme une menace immédiate.
Les investisseurs ont intérêt à renforcer la part de leurs actifs productifs, à documenter la réalité de leur activité locative et à profiter du dynamisme du marché de revente LMNP, encore sous-valorisé en 2025. »
4.6 À retenir
-
Les actifs immobiliers exploités en LMNP ou en bail commercial demeurent productifs et hors du champ de l’IFI élargi.
-
Les SCI à l’IR et holdings passives doivent être surveillées de près.
-
La réforme n’impacte pas directement la fiscalité LMNP, mais renforce la nécessité de prouver l’activité économique réelle.
-
Les opportunités de revente LMNP représentent un levier intéressant pour diversifier son patrimoine sans alourdir la fiscalité.
Pour en savoir plus sur les dispositifs LMNP et les stratégies d’investissement en immobilier géré, consulter :
-
Ministère de l’Économie – Location meublée non professionnelle (LMNP)
-
Insee – Études sur le marché locatif et les résidences gérées
5. Quels arbitrages patrimoniaux envisager ?
5.1 Anticiper sans précipitation
Face à une réforme encore incertaine, la première règle est claire : ne pas agir dans la précipitation.
L’IFI élargi n’est pas encore une loi promulguée, et les décrets d’application n’ont pas été publiés.
Les fiscalistes s’accordent à dire qu’il faut observer sans désorganiser sa stratégie actuelle, tant que les contours réglementaires restent flous.
Les arbitrages ne doivent être envisagés qu’après une lecture consolidée du texte final, prévue d’ici la fin du débat parlementaire au Sénat et sa promulgation éventuelle au Journal Officiel (legifrance.gouv.fr).
5.2 Arbitrages possibles à moyen terme
Réorienter les liquidités vers des actifs productifs
Les placements dormants (comptes à vue, livrets non réglementés, dépôts inactifs) pourraient devenir les plus exposés.
Les investisseurs peuvent envisager de :
-
transformer une partie des liquidités en titres d’entreprises françaises ou européennes (PME, ETI, fonds actions) ;
-
participer à des fonds d’investissement productifs labellisés (ex. : label Relance, label France Invest ou label ISR) ;
-
financer des projets locaux via des obligations vertes ou à impact (Banque de France – Marché des obligations vertes).
Objectif : réduire la part d’actifs improductifs tout en soutenant l’économie réelle.
Revoir la composition des contrats d’assurance-vie
Les détenteurs de contrats à forte proportion de fonds en euros peuvent :
-
augmenter la part d’unités de compte investies en actifs dynamiques (fonds actions, obligations, immobilier géré) ;
-
analyser les supports éligibles au label ISR ou Greenfin ;
-
vérifier les clauses fiscales auprès de leur assureur ou conseiller agréé (Autorité des marchés financiers – AMF).
Renforcer la part d’actifs professionnels
Les titres de sociétés, parts de SASU, SARL, SCI IS ou entreprises individuelles sont considérés comme actifs productifs lorsqu’ils participent directement à une activité économique.
Structurer son patrimoine autour d’un outil professionnel permet d’alléger son exposition à l’IFI élargi, à condition de respecter les critères d’exploitation effective fixés par le Code général des impôts, article 975.
Diversifier via le marché secondaire LMNP
Les biens LMNP de revente (résidences étudiantes, seniors, affaires) restent des actifs productifs, fiscalement attractifs et à rendement net stable.
En cas de durcissement global de la fiscalité du capital, le LMNP constitue un levier de diversification et un outil de rendement à court terme, sans exposition à l’impôt sur la fortune.
5.3 Arbitrages à éviter
Les réactions hâtives peuvent être contre-productives, voire risquées fiscalement.
Trois erreurs majeures à éviter :
-
Désinvestir massivement en liquidités ou assurance-vie sans certitude sur la portée exacte du texte.
-
Créer une structure patrimoniale “artificielle” (SCI ou holding sans activité réelle) dans l’unique but d’échapper à l’IFI : cette stratégie peut être requalifiée en abus de droit fiscal selon l’article L64 du Livre des procédures fiscales.
-
Sous-estimer les coûts de transaction et de fiscalité indirecte (Flat Tax, prélèvements sociaux, droits d’enregistrement).
Avant toute opération, il est conseillé de réaliser une simulation IFI élargi à partir de son patrimoine réel, puis de tester différents scénarios d’arbitrage avec son expert fiscal ou son conseiller en gestion de patrimoine agréé ORIAS.
5.4 Structurer une holding patrimoniale de gestion
La création d’une holding de gestion peut devenir un outil efficace de pilotage, à condition :
-
que la société détienne des participations actives (non purement financières) ;
-
qu’elle dispose d’une activité réelle (animation, financement, gestion) ;
-
et qu’elle tienne une comptabilité distincte des avoirs personnels.
Cette approche permet :
-
d’unifier la gestion du patrimoine professionnel et immobilier ;
-
d’arbitrer plus librement les flux financiers ;
-
et d’assurer une traçabilité juridique conforme aux exigences de l’administration fiscale.
Mais l’efficacité d’une telle structure dépend du statut fiscal choisi (IS ou IR) et du volume d’actifs sous gestion.
Une étude préalable est indispensable avant toute mise en place.
5.5 Conseil stratégique : la documentation avant l’action
La réforme actuelle introduit une nouvelle ligne de fracture : entre les patrimoines structurés, documentés et actifs, et ceux subis, inertes ou dispersés.
Avant même de réallouer ses actifs, il faut préparer la preuve de la productivité du patrimoine.
Checklist à conserver :
-
contrats de location et baux en cours,
-
relevés de revenus BIC ou BNC,
-
attestations de placement (fonds ISR, PME, participations),
-
justificatifs de flux économiques (dividendes, loyers, salaires).
Cette documentation constituera un bouclier de conformité si l’administration demande à démontrer la nature “productive” des avoirs.
5.6 En synthèse : agir avec discernement
-
Ne pas réagir tant que la réforme n’est pas consolidée.
-
Identifier la part du patrimoine susceptible d’être requalifiée “improductive”.
-
Réaffecter progressivement les liquidités vers des actifs productifs (immobilier géré, entreprises, ISR).
-
Conserver une tracabilité claire des décisions et arbitrages.
-
S’appuyer sur des partenaires spécialisés (CGP, notaire, fiscaliste).
L’IFI élargi s’annonce moins comme un impôt ponctuel que comme une incitation structurelle à repenser la productivité du patrimoine.
Les investisseurs les mieux préparés seront ceux qui auront su anticiper la transition avant même qu’elle ne soit imposée.
6. Conclusion d’expert – Yoann MAXEL,
Opérateur immobilier, spécialiste en LMNP et résidences gérées
L’IFI élargi s’inscrit dans une tendance de fond : celle d’une fiscalité du patrimoine orientée vers la performance économique.
L’État cherche moins à sanctionner la détention qu’à stimuler la circulation du capital vers des actifs jugés utiles, productifs et traçables.
Mais derrière la logique politique, plusieurs failles techniques subsistent :
-
l’absence de définition claire du terme improductif,
-
les contradictions entre l’IFI et le régime des sociétés à l’IS,
-
et la difficulté pratique de mesurer la “productivité” d’un patrimoine complexe.
Ces incertitudes rappellent une réalité essentielle : toute réforme fiscale est réversible dans son esprit, mais rarement dans ses effets.
Une mauvaise anticipation peut se traduire, demain, par une perte de rendement, une exposition inattendue ou une contrainte administrative supplémentaire.
Pour les investisseurs immobiliers, et notamment pour ceux positionnés sur le marché des résidences gérées ou du LMNP, la prudence reste la meilleure stratégie :
-
sécuriser les flux existants,
-
documenter la productivité réelle des actifs,
-
et profiter des fenêtres de stabilité actuelles pour renforcer ou arbitrer intelligemment.
L’immobilier exploité — résidence étudiante, senior, affaires, tourisme ou para-hôtelier — demeure aujourd’hui l’un des rares segments offrant à la fois visibilité, rendement et sens économique.
C’est dans cette cohérence que s’exprime toute la valeur ajoutée d’une gestion patrimoniale maîtrisée.
La position de Y’Asset Management
Chez Y’Asset Management, nous accompagnons nos partenaires et investisseurs dans une approche globale :
comprendre, structurer et valoriser chaque actif selon son rôle réel dans la chaîne de performance.
Notre conviction : la fiscalité n’est pas une contrainte, c’est un levier de stratégie.
Anticiper, c’est déjà investir.
Pour aller plus loin
-
Ministère de l’Économie – Impôt sur la fortune immobilière (IFI)
-
Assemblée nationale – Projet d’amendement du 31 octobre 2025
-
Cour des comptes – Fiscalité du patrimoine et financement de l’économie réelle (rapport 2024)
Vous souhaitez évaluer l’impact de l’IFI élargi sur votre patrimoine ?
Nos équipes accompagnent investisseurs et conseillers dans l’analyse, la projection et la valorisation de leurs actifs productifs.
→ Contactez Y’Asset Management pour une étude personnalisée par – ici